Les forêts, un riche patrimoine à préserver et valoriser

Ils sont jeunes, ils sont volontaires, passionnés par leur terre natale et souhaitent insuffler une nouvelle dynamique à leurs forêts, à leurs régions. Leur objectif : la protection de l’environnement et d’espèces naturelles et l’impulsion d’activités génératrices pour leurs communautés. Portraits d’acteurs de la société civile qui se battent pour la mise en place de chantiers de développement durable tout en y incluant des opérations de promotion d’un éco-tourisme responsable et solidaire.

Youness El Kasmi, fondateur du Tazekka Park-Club (spéléologie et sports de montagne), Taza. Action Forêt durable et Economie rurale – UE/DEF/GIZ │ © GIZ – Photographe : Abdelmoumen Aomari

Ils sont jeunes, ils sont volontaires, passionnés par leur terre natale et souhaitent insuffler une nouvelle dynamique à leurs forêts, à leurs régions. Leur objectif : la protection de l’environnement et d’espèces naturelles et l’impulsion d’activités génératrices pour leurs communautés. Portraits d’acteurs de la société civile qui se battent pour la mise en place de chantiers de développement durable tout en y incluant des opérations de promotion d’un éco-tourisme responsable et solidaire.

Passionné des sports de montagne, Younes El Kassmi a suivi un cursus de formation d’initiateur en spéléologie à l’étranger.  Un métier rare, une vocation née de sa passion pour les trésors naturels, la protection de l’environnement. De retour au Maroc, le jeune trentenaire a choisi de rejoindre le parc national de Tazekka, situé dans le Moyen Atlas, à proximité de la ville de Taza.

Younes a créé une association locale « Friouato[1] », pour la protection de l’environnement et la spéléologie. Il a également fondé le Tazekka Park, un club qui propose des activités d’éco-tourisme. Il participe ainsi à la promotion écotouristique de cette région. « Être originaire de cet endroit, et présent en permanence dans le parc, fait de moi un interlocuteur privilégié pour les services des Eaux et Forêts », affirme Younes. Depuis 2019, l’association Friouato bénéficie de l’appui de l’Action « Forêt durable et Économie rurale », un programme qui permet de profiter de modules de formation, d’un processus d’accompagnement entrepreneurial pour les jeunes impliqués dans des activités génératrices de revenus, notamment la gestion de l’aire de récréation du parc de Tazekka, ainsi qu’une formation d’interprétation des paysages et animation nature.

L’Action « Forêt durable et Économie rurale » cofinancée par l’Union européenne (UE) et le Ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement (BMZ) est exécutée conjointement par la Coopération allemande (GIZ) et le Département des Eaux et Forêts (DEF) dans le cadre du projet « Promotion des emplois verts au bénéfice des jeunes en zones rurales « Green Jobs ». « Il est très rare de trouver un partenaire aussi impliqué, assurant un appui de proximité aux acteurs locaux, en maintenant un haut niveau de qualité, de crédibilité et de respect des partenaires. Nous sommes ravis de cet appui de l’Union européenne, de la GIZ et du DEF ! » se réjouit Younes.

Cet appui s’est aussi concrétisé par le lancement par l’association d’une nouvelle activité de cyclotourisme, qui garantit un revenu supplémentaire aux jeunes actifs dans la région qui ont aujourd’hui un emploi fixe et bénéficie aussi aux offres d’accueil chez les habitants du parc. « Pouvoir réaliser mon projet personnel dans ma localité, où je songe à combiner la formation et l’activité touristique est une opportunité, cela donne un rayonnement national et international à ma zone, et participe à la création d’emplois ». Poursuit-il.

L’Action « Forêt durable et Économie rurale » intervient dans 4 régions du Maroc à savoir : Béni Mellal-Khénifra, Tanger-Tétouan-El Hoceima, Fès-Meknès et Rabat-Salé-Kénitra, elle contribue à la sensibilisation et au renforcement des capacités des usagers de la forêt, en les formant aux meilleures pratiques d’exploitation et à un esprit entrepreneurial. L’Action vise principalement, la durabilité des écosystèmes forestiers à travers la promotion d’emplois verts dans les milieux ruraux.

Des acteurs engagés

Dans la localité de Tizi n’Ait Ouirra, province de Béni Mellal, Abdelkrim Oukhali est surnommé « Aasat », ce qui signifie laurier sauce des Açores en Amazigh. Un surnom qui lui a été donné en raison de son acharnement pour la préservation et la valorisation de cette espèce menacée. Afin de protéger cette plante, l’auto-entrepreneur crée en 2019 la coopérative forestière Tizi n’Ait Ouirra avec l’appui de l’Action « Forêt durable et Économie rurale ». L’objectif principal de la coopérative est de réintroduire au Maroc le laurier sauce des Açores avec l’espoir que cette espèce regagne son biotope naturel. Pour y parvenir, Abdelkrim et les adhérents de la coopérative ont bénéficié d’un renforcement des capacités techniques, et d’une dotation en matériels et l’installation d’une pépinière. « C’est une première étape pour la restauration et la réhabilitation de cette espèce : 10 000 plants sont en cours de préparation » assure Abdelkrim.

La mise en place de la pépinière est une nouvelle opportunité d’emploi pour les habitants de la zone et contribuera à la promotion et commercialisation de cette espèce. « Dans le cadre du projet « Forêt durable et Économie rurale », environ 250 personnes en zones rurales organisées en coopératives ont, de ce fait, été soutenues pour la création de nouvelles activités génératrices de revenu dans les chaines de valeurs qui valorisent les produits forestiers ligneux et non ligneux. De plus, 500 membres issus de 20 organisations usagères de l’espace forestier (associations pastorales et coopératives de mise en défens) ont été formées sur les pratiques de gestion durable, pour améliorer la qualité de leurs produits et services ou encore pour gérer leurs structures de façon optimale. Aussi, cinq produits et services issus de la forêt ont été également intégrés dans les processus de développement et de promotion du patrimoine naturel forestier. « Une attention particulière a été allouée à la commercialisation des produits des coopératives via les plateformes digitales afin de promouvoir davantage leurs produits et conquérir de nouveaux marchés et clients. », détaille Lamia Boufaticha, coordinatrice de l’action « Forêt durable et Économie rurale » à la GIZ.

 

Three gardeners

Abdelkarim Oukhali et les membres de la coopérative forestière Tizi n’Ait Ouirra (Laurier sauce des Açores), Beni Mellal. Action Forêt durable et Economie rurale – UE/DEF/GIZ │ © GIZ – Photographe : Abdelmoumen Aomari

Des réformes ambitieuses

Au Maroc, l'Union européenne appuie les réformes du secteur forestier depuis plus de 10 ans. Ce programme d'appui, un des premiers dans le secteur, visait le renforcement de la protection et de la gestion durable des ressources forestières, en tenant compte des nouveaux enjeux relatifs à la gouvernance, à la territorialisation des politiques publiques, ainsi qu'à la participation économique, sociale et politique de la société civile.

La nouvelle stratégie « Forêts du Maroc 2020-2030 », lancée par le Roi Mohammed VI en 2020, vise un changement de paradigme pour l’administration forestière. Des objectifs ambitieux sont fixés pour accroitre la gestion participative des espaces et des ressources en associant tous les intervenants du secteur), pour moderniser le schéma institutionnel du secteur à travers la création de nouvelles structures de gouvernance et de concertation au niveau central et local, pour développer les métiers et filières autour de la valorisation durable des ressources des forêts et des parcs par l’amélioration des performances des exploitations de la forêt productive, l’écotourisme et les services (para)forestiers), et enfin pour promouvoir l’emploi décent et la protection sociale pour les jeunes et les femmes. « Nous avons ainsi construit, en une décennie, une relation forte et dynamique avec le département des eaux et forêts, qui a permis de développer un partenaire de qualité. L’UE appuie, aux côtés d’autres bailleurs désormais, les ambitieux objectifs de la nouvelle politique forêts du Maroc 2020-2030 » précise Beatriz Betagon-Ramiro, chargée du Programme forêts en cours à l’Union européenne au Maroc.

Avec 9 millions d’hectares, dont 5,8 millions boisés, les forêts marocaines représentent une richesse considérable pour le pays. En effet, le Maroc est le 2ème ''hotspot'' de biodiversité en Méditerranée avec 39 écosystèmes naturels différents dont 75% sont forestiers. Les espaces forestiers hébergent près de 18 000 espèces animales dont 11 % endémiques, 7 000 espèces végétales dont 20% endémiques et 154 Sites d’intérêt biologique et écologiques (SIBES) dont 80 Zones Humides.           

Ce patrimoine naturel joue un rôle fondamental pour la régulation du cycle de l'eau, la protection des sols et la lutte contre la désertification. Il joue également un rôle essentiel pour l’économie du Royaume. En effet, près de 7 millions de personnes, soit 20% de la population, issues des zones rurales, vivent des ressources et des produits dérivés issus de la forêt et les potentialités de créations d’emplois et d’entreprises sont importantes.

La problématique forestière de la région au Maroc conditionne les stratégies et les choix politiques de gestion et de conservation des forêts et de l'environnement naturel, mais aussi les orientations en matière d'éducation, de formation et de recherche forestières.

La politique forestière a été opérationnalisée à travers l’élaboration et la mise en œuvre de plusieurs programmes qui ont permis d’inclure les besoins émergents et d’adapter le rythme d’exécution aux contraintes des ressources humaines et financières et à la capacité de réalisation des entreprises forestières. Les principales réalisations enregistrées dans le cadre de cette politique en matière de réhabilitation et d’extension des forêts se résument comme suit, l’augmentation du rythme annuel de reboisement et de régénération à plus de 40.000 ha, la création de ceintures vertes et aménagement de Forêts urbaines et périurbaines sur 100.000 ha, l’incitation à la reforestation et promotion de l’arbre dans les terrains privés ainsi que la distribution de 6 millions de plants par an.

[1] Le gouffre de Friouato : https://www.parctazekka.ma