DISCOURS DE L’UE A L'EXAMEN DE LA POLITIQUE COMMERCIALE DE LA SUISSE ET DU LIECHTENSTEIN, 18 MAI 2022

Intervention de l'Ambassadeur João Aguiar Machado

L’Union européenne souhaite la bienvenue à Son Excellence M. Markus Schlagenhof et à toute la délégation Suisse ainsi qu’à Son Excellence M. Kurt Jäger et à l’ensemble de la délégation du Liechtenstein pour le 6e examen de leur politique commerciale. Je remercie également l’Ambassadeur du Singapour, Son Excellence M. Hung Seng TAN, le Secrétariat de l’OMC (et les délégations concernées) pour leurs rapports à notre disposition pour nos discussions de ce jour.

Le monde d’aujourd’hui connaît des changements rapides. Ces dernières années, nous avons entre autres assisté à une récession mondiale provoquée par la crise sanitaire, et plus récemment, à un retour de la guerre en Europe.

Aujourd’hui, nous sommes malheureusement tous témoins d’une agression injustifiée et non-provoquée de la Russie contre l’Ukraine. L’Union voudrait saisir cette occasion pour remercier la Suisse et le Liechtenstein d’avoir exprimé leur solidarité au peuple ukrainien en s’alignant sur les sanctions de l’UE contre la Russie et la Biélorussie. En effet, la Suisse et le Liechtenstein jouent un rôle important dans le succès des sanctions économiques de l’UE contre la Russie et la Biélorussie. C’est pourquoi nous continuerons de faire preuve d’une volonté commune face à ces actes de violence, l’union faisant la force.

Ces remarques introductives étant faites, revenons-en à présent au sujet de la réunion de ce jour, l’examen de la politique commerciale de la Suisse et du Liechtenstein.

Comme illustré dans le rapport du Secrétariat, la Suisse et le Liechtenstein tirent profit des conditions économiques favorables, toutefois, ils sont également confrontés à des défis similaires, notamment le vieillissement de la population, la faible croissance de la productivité, l'adaptation à la numérisation, le changement climatique et les prix élevés. Ce dernier élément a amené les autorités Suisses à annoncer la suppression des droits de douane sur les produits industriels. L’UE suivra avec intérêt la mise en œuvre ainsi que l’impact de cette réforme sur l’économie Suisse.

Je tiens à rappeler que la Suisse et le Liechtenstein sont parmi les voisins de l’UE les plus proches. L’Union européenne est, et de loin, le principal partenaire commercial des deux pays avant les États-Unis, la Chine et le Royaume-Uni. Cela s’explique non seulement par notre proximité géographique mais aussi historique, culturelle et économique. 

Aujourd’hui, la Suisse demeure le quatrième partenaire commercial de l’UE pour les biens, atteignant une somme de plus de €280 milliards. Quant au commerce des services, la Suisse est notre troisième partenaire commercial.

Pour ce qui est du Liechtenstein, en 2020 les flux commerciaux bilatéraux de biens et de services ont atteint plus de €3.5 milliards. 

Au demeurant, durant la crise sanitaire, la proximité de nos marchés, et l'intégration étroite de nos chaînes de valeur ont préservé dans une large mesure nos flux commerciaux bilatéraux.

Cela étant, il y a matière à amélioration s’agissant de l’accès au marché Suisse. Je souhaiterais mentionner des points de préoccupation immédiats pour nos opérateurs économiques, à titre d’exemple :

  • Les tarifs excessivement élevés et complexes sur l’importation des produits agricoles en Suisse demeurent une entrave commerciale importante. Cette haute protection tarifaire pourrait, par ailleurs, constituer un obstacle à l’objectif suisse de garantir un approvisionnement alimentaire suffisant pour sa population.
  • En ce qui concerne l’attribution de la certification d’aliments biologiques, l’Union européenne encourage la Suisse à édicter des règles claires et non-discriminatoires ou à créer un label biologique suisse uniforme.
  • Quant à la question des marchés publics, l’UE félicite la Suisse pour sa révision de la Loi fédérale, notamment ses critères d'attribution écologiques et socialement durables, elle rappelle néanmoins que ces critères ne devront en aucun cas écarter de manière injustifiée les acteurs européens et internationaux.
  • S’agissant des « mesures d’accompagnement », il s’agit du problème le plus important rencontré par les fournisseurs de service de l’UE souhaitant exercer en Suisse.
  • Pour conclure cette liste non exhaustive, l’absence d’ouverture à la concurrence de certains secteurs comme les télécoms demeure également une barrière importante à l’accès au marché Suisse. 

Nous espérons que nos partenaires Suisses seront ouverts à trouver des solutions à ces problèmes.

Comme mentionné dans le rapport du Secrétariat, en 2021 la Suisse a pris la décision de se retirer des négociations avec l’UE sur l’Accord-cadre institutionnel, qui constituait une nouvelle base solide pour notre relation bilatérale. L’UE ne peut que regretter cette décision. De fait, elle pourrait entre autres impacter nos relations commerciales futures car la modernisation de notre accord de libre-échange, qui figurait parmi les objectifs de l’accord-cadre, ne s’est pas concrétisée. Toutefois, l’Union européenne est prête à reprendre ses efforts pour renouer le dialogue avec les autorités Suisses afin de trouver des solutions durables et mutuellement bénéfiques aux questions pour lesquelles l’Accord-cadre institutionnel était amené à trouver des réponses, y compris une actualisation de l’Accord de libre-échange qui date de 1972. Pour cela, nous attendons du Conseil fédéral Suisse un engagement politique clair et sans ambiguïté dans ce dossier et dans d’autres questions clés de notre relation bilatérale.

Au-delà, la pandémie a souligné l’importance de maintenir la coopération mondiale et le multilatéralisme. Nous saluons nos efforts conjoints, et remercions la Suisse pour sa bonne coopération en vue de trouver des solutions durables aux multiples défis du système commercial multilatéral. Je pense à la réponse à la crise sanitaire et à la réforme de l’OMC. Cette réforme témoigne d’une volonté commune de garder l’OMC pertinente pour les défis du XXIe siècle. Parallèlement, nous apprécions l’engagement dans les négociations entre autres sur les questions liées à l’agriculture, la sécurité alimentaire et la pêche qui comptent parmi les objectifs clés de la douzième Conférence ministérielle de l’OMC.

Pour conclure, nous espérons que nos relations bilatérales seront à la hauteur de l’intégration très profonde de nos économies. L’Union européenne souhaite un examen constructif et deux jours d’échanges riches à la Suisse et au Liechtenstein. Je vous remercie pour votre attention.