Jeunesse et culture, un tandem d’avenir

Symbole de l’avenir d’un pays, le partenariat Maroc- Union a placé la jeunesse parmi ses priorités. Des réflexions, des échanges et des études sont menées pour proposer aux jeunes des programmes et des projets qui couvrent tous les domaines : l’éducation la formation, l’entrepreneuriat et la culture. Pour offrir aux jeunes un monde meilleur, équitable où ils puissent s’épanouir. Ce 12 août marque la célébration de la Journée internationale de la Jeunesse, l’occasion de revenir sur le potentiel d’avenir entre la jeunesse et la culture à travers deux programmes régionaux de l’Union européenne. Des programmes ambitieux, qui pour l’un soutient une démarche artistique et culturelle qui se veut engagée, quand l’autre soutient l’entrepreneuriat culturel et la création d’emploi. Récit des impressions et du vécu d’artistes marocains bénéficiaires de ces programmes.

 

Pour Youssef El Idrissi et Nouha Ben Yebdri, leur participation au programme Youth-Led Cultural and Civic Initiatives (YLCCI) a été une aubaine et une expérience particulièrement fructueuse. Youssef, artiste, DJ et animateur culturel, qui a créé Kounaktif, un collectif d’artistes activistes, a pu grâce à la bourse du programme, organiser une résidence d’artistes à Chefchaouen où il a rassemblé des artisans et des artistes de divers bords pendant un mois, et qui a abouti à une exposition dans une galerie de la célèbre ville bleue. Quant à Nouha, curatrice et coordinatrice culturelle, propriétaire d’une petite galerie appelée Mahal Art Space, elle a pu accueillir dans sa galerie à Tanger, cinq artistes peintres qui se sont relayés durant cinq mois en 2022, pour exposer ensuite leurs œuvres. Deux expériences abouties qui leur ont permis de concrétiser des projets qui leur tenaient à cœur et à mettre en avant les artistes émergeants de leurs régions.

Youssef, artiste, DJ et animateur culturel parlant avec un micro à la main lord d'une rencontre dans le cadre du programme Youth-Led Cultural and Civic Initiatives

Brahim Zouin et Hanae Kouach ont pour leur part été sélectionnés pour collaborer à la Training Academy du programme CREACT4MED qui s’occupe avant tout des jeunes et des femmes qui souhaitent lancer leur startup dans le domaine culturel et créatif. Brahim, qui réside à Marrakech, est producteur de musique et ingénieur du son, quant à Hanae, installée à Rabat, est ingénieur informatique avec, à son passif, une expérience de salariée en entreprise. Cette formation leur a donné l’occasion de mieux appréhender l’approche de leurs projets respectifs. Elle a été comme un incubateur, qui leur permettra de souscrire à la dernière étape à venir, celle d’obtenir une subvention pour la création de leurs entreprises respectives.

La culture comme engagement citoyen

All-Around Culture, aussi appelé en arabe Thaqafa Dayer Maydoor, qui sert d’ombrelle au programme du Youth-Led Cultural and Civic Initiatives (YLCCI) est une association à but non lucratif cofinancée par l’Union européenne. Elle regroupe en son sein diverses associations de la société civile des pays de la zone MENA. Leur dessein est de mettre en relation, et de former des artistes et des acteurs culturels porteurs de projets pour qu’ils œuvrent in situ dans leurs localités.

Elle apporte son soutien aux initiatives culturelles et civiques, leur procure une opportunité de réseautage, instaure un laboratoire collaboratif où l’échange d’expériences est permis, et où la consultation des pairs et le mentorat sont mis à l’honneur.

Les artistes, collectifs et opérateurs culturels de la zone de voisinage du Sud de l’Union européenne, s’allient dans des activités culturelles qui se veulent citoyennes pour développer des projets qui concordent avec leur environnement, où prime un esprit de corps entre les uns et les autres.

Comme l’explique Mohab Saber, le coordinateur de All-Around Culture : « La région MENA a été secouée par beaucoup d’instabilité et d’agitation ces dernières années, et le programme All-Around Culture est notre manière de contribuer à une infrastructure viable, forte et enracinée localement pour soutenir la culture, quoi qu’il advienne ».Les associations jouent un rôle majeur dans ces pays de la région MENA, car elles octroient des financements et des aides, mettent en place un relais d’information et aident à obtenir des visas. Ce sont elles aussi qui orchestrent le plus souvent les rencontres culturelles : festivals, expositions, résidences d’artistes…

 

L’Union européenne travaille avec le Maroc et les pays partenaires du sud sur des programmes autour de la jeunesse projets, convaincue que la culture et la citoyenneté peuvent apporter un élan positif sur tous les plans pour les pays et les sociétés de la région.

Qu’est-ce que les bénéficiaires marocains ont appris de leur participation à ce programme ? Brahim et Hanae  estiment que cette expérience qui est toujours en cours, leur a donné l’opportunité d’innover, de tester de nouveaux usages, d’échanger et de nouer des liens lors de rencontres à Tunis et à Amman, ou encore par vidéo-call tous les autres jours.

Nouha estime que ce programme propose quelque chose de différent et d’essentiel : un cadre. Car selon elle : « Etre artiste c’est aussi un travail et un travail sérieux ». Youssef aime à reprendre le proverbe marocain : « Une seule main n’applaudit pas » et se dit heureux de participer à quelque chose qui a du sens, car là ce « n’est pas de l’art pour l’art mais de l’art pour la société ». Toujours selon Mohab Saber : « Notre objectif principal consiste à favoriser un écosystème culturel vital, spécialement dans les régions défavorisées, et à nourrir la diversité et le dialogue entre l’ensemble des acteurs culturels de la région. »

Ces programmes citoyens peuvent mener in fine à l’entrepreneuriat culturel, où selon leurs dires il y a « un potentiel énorme ».

 

La culture comme gisement d’emploi

Creact4MED, acronyme de Creative Entrepreneurs Acting For the Future Mediterranean, s’adresse particulièrement aux jeunes et aux femmes en encourageant la création d’emploi à travers des projets culturels et créatifs dans la zone de voisinage du Sud de l’Union européenne. Les pays bénéficiaires regroupent l’Algérie, l’Égypte, la Jordanie, Israël, le Liban, le Maroc, la Palestine et la Tunisie. Cofinancé à 90% par l’Union européenne, ce programme a été créé par la Commission européenne pour une durée allant de 2019 à 2024, avec comme partenaire principal l’Euro-Mediterranean Economists Association (EMEA) à travers l’Europe Aid programme. Creact4MED s’occupe des industries culturelles et créatives (ICCs) qui est l’alliance de la créativité et de l’entrepreneuriat, de l’artistique et du commercial. Elles regroupent les arts et la culture, les médias et le design, et elles sont dorénavant considérées comme un secteur prometteur d’emploi et d’avenir.

La Training Academy est une des activités que propose le CREACT4MED, à laquelle ont participé Brahim et Hanae, elle offre une formation en libre accès et en ligne aux jeunes et aux femmes. Elle les aide à renforcer leurs capacités entrepreneuriales en jouant un rôle d’incubateur. En partenariat avec l’Institute of Entrepreneurship Development (iED), qui s’adresse à près de 240 entreprises dans ces pays concernés, ils servent tous deux de guide pour l’élaboration d’un plan d’affaires complet. En fin de parcours, les participants retenus pourront postuler à une subvention de 15.000 euros, qui est l’équivalent peu ou prou de 150 000,00 MAD pour leur projet d’entreprise. Ce programme de subvention est destiné à la création d’une entreprise culturelle et créative.

L’entrepreneuriat dans les industries culturelles et créatives ambitionne de produire des biens culturels dans des régions où le marché est moins favorable au développement de ce secteur.  Il s’agit d’aider l’envol de petites structures qui vont constituer peu à peu une base de réseau, puis un écosystème qui les rendraient viables et pérennes. Il est alors nécessaire de parer à la tension entre les impératifs artistiques et économiques, ainsi que la tension entre la création et la viabilité économique des projets issus de ses industries. Le but est de créer un environnement propice, qui puisse soutenir les ICCs industries culturelles et créatives et les projets culturels, et en accroître la valeur marchande ; encourager les initiatives des jeunes et des femmes à forte créativité et à forte valeur économique, tout cela sert à renforcer les industries culturelles et créatives et incite à la création d’emplois.

Cette formation de la Training Academy, permet des échanges entre les artistes et les gestionnaires de projet, avec l’exigence d’une planification technique du projet créatif. Pour Brahim et Hanae, elle leur a permis de mieux appréhender leurs projets respectifs, un creative studio pour Brahim, et une startup d’organisation de mariage pour Hanae. Tous deux ont déjà une expérience en entreprise, Brahim en tant qu’auto-entrepreneur et Hanae en tant que salariée. Reste que l’enseignement des aspects juridiques, marketing et autres est un apport considérable, ainsi que les opportunités d’échanges entre les pairs et avec des experts régionaux ou des chefs d’entreprises, qui viennent partager leurs expériences et leurs success stories. Cet enseignement, qui est une étape incontournable du projet, leur permettra de présenter un projet d’entreprise abouti et viable, pour qui veut obtenir le sésame de la subvention.

L’appui financier de l’Union européenne accompagne les programmes des associations culturelles qui encouragent la spontanéité créatrice et la réflexion artistique sociale et citoyenne, comme il permet aux structures de donner des subventions dans les industries culturelles et créatives. Finalement, les deux démarches permettent de créer ou d’organiser une économie de la culture, plus résiliente, créatrice d’emploi et de croissance. Désormais, la culture est considérée comme une formidable pourvoyeuse de stabilité et de développement d’une part et d’emplois et de revenus d’autre part.