Pérou: déclarations du haut représentant/vice-président, Josep Borrell, lors de la conférence de presse commune avec le ministre des relations extérieures, Óscar Maúrtua
Seul le texte prononcé fait foi.
Monsieur le ministre, mon cher Óscar, Mesdames et Messieurs les ambassadrices et ambassadeurs, Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi de vous dire à quel point je suis satisfait de me trouver aujourd'hui à Lima. Et je tiens à remercier très sincèrement le ministre des relations extérieures, M. [Óscar] Maúrtua, de m'avoir reçu aujourd'hui de manière si solennelle et chaleureuse en ce magnifique palais. Merci beaucoup, cher ministre, je ne pourrai jamais être à la hauteur de cet accueil lorsque tu nous rendras visite à Bruxelles. Tu m'as réservé un accueil extraordinairement chaleureux et je souhaite - en mon nom et au nom de l'Union européenne - t'en remercier.
Il s'agit de ma première visite dans un pays d'Amérique latine depuis que - il y a près de deux ans - j'ai pris mes fonctions de haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et de défense. Et le Pérou est ma première destination en Amérique latine. Je veux ainsi démontrer et souligner l'importance que l'Union européenne attache à ses relations avec le Pérou en ce moment si particulier de sa vie politique, dont nous voulons profiter pour consolider et approfondir notre coopération.
Le Pérou est un partenaire clé de l'Union européenne. À notre programme commun figurent les relations bilatérales, régionales et multilatérales. Et, de fait, cher Óscar, c'est aux Nations unies que nous nous sommes vus la dernière fois. Des raisons impérieuses nous poussent à travailler ensemble pour faire face à des défis d'envergure mondiale tels que le changement climatique, qui est aujourd'hui tellement d'actualité; le trafic de stupéfiants, un problème colossal pour le monde entier et en particulier pour la région latino-américaine; la pandémie, qui a frappé le Pérou avec une dureté extraordinaire, et je sais que le gouvernement actuel fait de la lutte contre cette maladie l'une de ses priorités; et la lutte contre la pauvreté et l'inégalité.
Nous avons des accords d'association qui constituent un cadre stable et nous aident à maintenir une relation constructive. Et je souhaite aussi que nous tirions profit des opportunités que notre coopération présente pour nos citoyens dans les deux régions, à commencer par le commerce. Le ministre du commerce extérieur et du tourisme [, M. Roberto Sánchez,] m'a fait un exposé très intéressant, et j'ai pris connaissance des progrès accomplis par le Pérou en ce qui concerne son rôle sur la scène internationale.
L'Union européenne et le Pérou ont conclu en 2013 un accord de libre-échange qui fêtera bientôt ses dix ans - et qui a généré des échanges d'une valeur de 8 milliards d'euros – et les Européens sont le troisième partenaire commercial du Pérou. Je suis certain que notre coopération va continuer de créer des opportunités, tout particulièrement pour les agriculteurs, comme elle l'a fait pour les exportations effectuées vers l'Union européenne par de nombreuses petites entreprises créées à la faveur de cette opportunité.
Il en va de même en matière de sécurité. Le Pérou a une grande expérience des missions internationales de paix et de sécurité et je me réjouis que nous puissions bientôt signer un accord de coopération - j'aurais aimé pouvoir le faire aujourd'hui, mais ce sera pour bientôt - qui permettra aux forces armées péruviennes, qui m'ont reçu si dignement ce matin, de participer à des missions et opérations de l'Union européenne dans le monde entier- il en existe 17 -, contribuant ainsi à la paix et à la sécurité en des points très divers de la planète.
La pandémie, comme je le disais tout à l'heure, a été, est et continuera d'être, je le crains, un élément clé de la lutte des gouvernements pour le bien-être de la population. Et nous ne pourrons la surmonter que quand tout le monde aura eu accès aux vaccins. Comme nous avons l'habitude de le répéter, "personne ne sera à l'abri tant que tout le monde ne sera pas à l'abri", parce que tant que quelqu'un sera porteur de la maladie, le risque de contagion subsistera.
Le Pérou a reçu de l'Union européenne trois millions de doses de vaccins grâce au mécanisme COVAX, et le pays européen que je connais le plus, à savoir l'Espagne, a en outre fourni des vaccins à titre individuel. Et je me réjouis de pouvoir annoncer que nous allons signer une convention de coopération pour l'accès universel à la santé, à laquelle l'Union européenne contribuera à hauteur de 14 millions d'euros, parce que nous pensons que l'accès universel à la santé est la preuve la plus flagrante de la cohésion sociale d'un pays.
Cher ministre, chère présidente [du Congrès de la République, Mme María del Carmen Alva], nous nous associons également au Pérou en matière de relance économique post-pandémie. Je suis heureux d'annoncer que notre programme de coopération va mobiliser 57 millions d'euros au cours des trois prochaines années afin de promouvoir des investissements verts et inclusifs et de renforcer la protection sociale.
Vous pouvez compter sur l'Union européenne, cher ministre, pour le développement de votre programme social. À cet égard, nous lançons aujourd'hui un important programme de coopération contre la violence à caractère sexiste, un fléau à combattre dans tous les pays.
Permettez-moi également de vous faire part de la préoccupation que m'inspire, que nous inspire, l'érosion de la confiance dans la démocratie que nous constatons sur le continent latino-américain et que signale la récente enquête Latinobarómetro que j'ai lue pendant mon voyage en avion. Je pourrais en dire de même de l'Eurobaromètre, parce que la perte de confiance n'est pas un "privilège" de l'Amérique latine, c'est aussi un problème que rencontrent les sociétés européennes. Selon le Latinobarómetro, 49 % seulement de la population est favorable à la démocratie. Et pour contrer cette tendance et pouvoir stimuler la reprise économique et sociale après la pandémie, il est fondamental de maintenir la stabilité démocratique et le dialogue entre les institutions. Mais la démocratie se renforce à travers des processus qui permettent aux citoyens de choisir librement leurs gouvernants et de respecter le résultat des élections, aussi serré soit-il. Celui ou celle qui remporte les élections, c'est celui ou celle qui arrive en tête, quel que soit l'écart qui le ou la sépare du suivant ou de la suivante.
Demain, je rencontrerai le président [du Pérou, Pedro] Castillo, et j'aurai l'occasion de vous rencontrer également, chère présidente [du Congrès de la République], Madame María del Carmen Alva. J'aurai en outre l'opportunité de dialoguer avec des représentants du secteur des entreprises et avec des organisations de la société civile. Avec elles et eux, je souhaite mieux comprendre quelle est leur vision du programme de développement de la démocratie et des droits de l'homme au Pérou. Il s'agit de thèmes très importants pour nous aussi. Cet après-midi, j'aurai l'occasion de faire la connaissance de femmes de la communauté Sarhua, qui travaillent dans le cadre d'un projet cofinancé par l'Union européenne, qui promeut le développement personnel des artisanes et leur insertion pleine et entière dans la société.
Nous avons donc devant nous un vaste programme de coopération fondé, il ne saurait enêtre autrement, sur le respect mutuel. Je me réjouis d'être de retour au Pérou. J'y suis venu il y a de nombreuses années en tant que ministre du gouvernement espagnol et je suis très heureux d'y revenir aujourd'hui en tant que représentant d'une communauté politique plus grande que mon propre pays, en espérant que grâce à cette visite, les Européens accorderont à l'Amérique latine toute l'attention que ce grand continent mérite.
Cher ministre, merci beaucoup pour tout.
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